Europe : le Maroc creuse l’écart avec la France en 2024

L’excédent commercial Maroc France 2024 s’élève à 15,9 milliards de dirhams, contre 11,9 milliards en 2023, selon l’Office des Changes. Ce bond reflète la progression des exportations marocaines vers l’Hexagone, faisant de la France un partenaire stratégique dans l’amélioration du solde commercial national.

L’Europe toujours en tête, mais un déséquilibre structurel

L’Union européenne demeure le partenaire commercial de référence du Maroc, représentant 653,8 MMDH d’échanges, soit 53,7 % du total, malgré un recul d’un point. Toutefois, le déficit commercial avec l’Europe s’établit à -103,2 MMDH, illustrant une dépendance persistante. Certaines relations bilatérales se démarquent positivement : la France, deuxième partenaire du Royaume, voit son excédent passer à 15,9 MMDH (+4 MMDH sur un an), témoignant du dynamisme des exportations marocaines, notamment dans les secteurs automobile et aéronautique. D’autres partenaires comme la Russie (+2,9 MMDH) et les Pays-Bas (+1,3 MMDH) présentent aussi une amélioration du solde.

Un déficit asiatique alimenté par la Chine

Le déficit commercial avec l’Asie s’aggrave de 15,6 MMDH (+11,5 %), principalement à cause de la Chine, qui concentre à elle seule une hausse de 13,8 MMDH. Cette évolution résulte d’une demande accrue pour des biens manufacturés — électronique, équipements industriels, produits chimiques — essentiels à la transformation industrielle du Maroc, mais révélateurs d’une dépendance croissante aux intrants asiatiques.

Les Amériques : rebond commercial mais déséquilibre renforcé

Les échanges avec les Amériques repartent à la hausse après une année 2023 en recul. Les importations augmentent de 6,6 MMDH et les exportations de seulement 1,7 MMDH, aggravant le déficit à -66,5 MMDH. Les États-Unis dominent cette relation avec un déficit bilatéral de 57 MMDH. Le gaz de pétrole reste la première source d’importation américaine (15 MMDH, soit 14,3 % du total), tandis que le Canada (-4,1 MMDH) et le Brésil (-2,4 MMDH) conservent un solde négatif.

L’Afrique, entre ambition continentale et réalité commerciale

Le solde commercial avec l’Afrique reste positif à 7,2 MMDH mais s’érode (-5,4 MMDH), miné par la baisse des excédents avec la Côte d’Ivoire (-1,5 MMDH), Djibouti (-1,3 MMDH) et la hausse du déficit avec l’Égypte, qui passe de -8,8 à -11,8 MMDH. Les exportations vers l’Afrique demeurent centrées sur les engrais naturels et chimiques, qui génèrent 9,6 MMDH (en baisse de 886 MDH), illustrant la concentration sur une gamme limitée de produits.

Un pivot océanien prometteur mais encore marginal

Le Maroc enregistre un excédent commercial record avec l’Océanie à 3,8 MMDH, contre 2 MMDH en 2023. Ce bond s’explique par le doublement des exportations de phosphates (de 2 à 4,7 MMDH), signalant un intérêt croissant pour la diversification des débouchés. Malgré son poids modeste dans les échanges globaux, ce signal témoigne d’une stratégie d’ouverture vers de nouveaux relais de croissance.

Libre-échange : des leviers à double tranchant

Les importations dans le cadre des accords de libre-échange atteignent 225,5 MMDH en 2024, en hausse de 8,5 % (+17,6 MMDH). L’accord avec l’Union européenne reste prépondérant (66 % des flux), avec des records d’importations depuis l’Allemagne (17,9 MMDH) et une reprise des achats en provenance de France (+2,2 MMDH). Les véhicules utilitaires et de tourisme représentent à eux seuls 3 MMDH. L’accord avec les États-Unis enregistre une forte dynamique (+14,7 %, soit +4,6 MMDH), portée par les importations d’aéronefs (+3,1 MMDH). Celui avec la Turquie progresse de +8,2 % (+2 MMDH), tandis que l’accord d’Agadir montre la plus forte croissance en valeur (+2 MMDH), avec une domination des demi-produits (42 %) et produits finis (24 %). En revanche, l’accord avec l’AELE est en recul (-11,9 %, soit -328 MDH).

Déficit structurel : un défi récurrent à surmonter

Malgré une croissance des exportations de 6,1 % à 456,3 MMDH, les importations progressent plus rapidement (+6,4 %, à 761,3 MMDH), creusant le déficit à -304,9 MMDH. Le taux de couverture recule à 59,9 % (-0,2 point), tandis que les indicateurs structurels se dégradent : taux de dépendance commerciale à 39,7 % du PIB (+0,5 point) et taux de pénétration des importations à 41,4 % (+0,5 point). Ces chiffres reflètent une vulnérabilité persistante à l’égard de la demande étrangère et aux aléas des chaînes d’approvisionnement.

Le paysage du commerce extérieur marocain en 2024 révèle à la fois des signaux positifs — diversification géographique, renforcement des excédents ciblés — et des fragilités structurelles persistantes. Pour les opérateurs économiques, la priorité est de consolider l’avantage comparatif dans des secteurs à forte valeur ajoutée (automobile, aéronautique, chimie verte), tout en maîtrisant les flux importés par une politique industrielle cohérente. La diplomatie commerciale devra quant à elle s’aligner sur une logique de réciprocité et de montée en gamme. Plus que jamais, la compétitivité logistique et l’intelligence économique sont appelées à devenir des piliers de résilience dans un environnement international volatil.